Lorsque vous recherchez le mot « vulnérable » dans un dictionnaire de synonymes, les premiers mots que l’ont vous propose sont : « chancelant », « précaire », « faible » et « fragile ». De telles associations linguistiques démontrent que la société associe encore principalement l’ouverture émotionnelle à la faiblesse. Cette tendance à interpréter le mot de cette manière est particulièrement vraie dans les attitudes du monde du travail à l’égard de la vulnérabilité, où « gestion » est souvent synonyme de mots tels que « pouvoir » et « contrôle ». J’ai fait l’expérience d’approches restrictives de la vulnérabilité lorsque j’ai repris le travail après mon diagnostic de maladie de Still. J’avais des difficultés à marcher en raison de douleurs articulaires et mon responsable m’a demandé : « Comment pourras-tu paraître crédible si tu boites ? ». Mon entreprise ne savait pas comment m’aider et m’accompagner avec mes ennuis de santé autant physique que mentale. Ils étaient davantage préoccupés par mon apparence de cadre supérieur, que par l’aide dont j’avais besoin.
Les cadres supérieurs ont du mal à parler de leur vulnérabilité en raison de pressions externes, qu’il s’agisse de nouvelles politiques hybrides ou du phénomène de rareté de la main-d’œuvre. Les chefs d’entreprise chargent souvent les cadres et les directeurs de veiller à la santé mentale de leurs équipes. Cependant, il existe rarement une infrastructure adéquate leur permettant de recevoir de l’aide en retour. Historiquement, la vulnérabilité dans les rôles de direction reflétait une force insuffisante pour accomplir son travail efficacement. Dans de nombreux domaines, le fait de demander des conseils est considéré comme une faiblesse, car cela traduit un manque de connaissances. Cette dynamique avec la santé mentale, contribue à créer des environnements de travail toxiques, où les gens ont peur de partager leurs difficultés ou de se montrer sensibles. Nous devons changer notre manière de percevoir la vulnérabilité sur le lieu de travail, en plus de modifier notre perception du mot lui-même.
Pendant ma première année aux prises avec la maladie de Still, j’ai visionné la série documentaire Lenox Hill, sur Netflix. La série raconte l’histoire de deux médecins qui concilient leur vie personnelle et professionnelle dans un hôpital de Manhattan. L’un des médecins décide d’afficher ouvertement ses difficultés après avoir subi une blessure. Son collègue pour sa part, estime qu’il n’est pas approprié de le faire. En partageant son état de santé avec ses patients, le médecin crée des liens plus forts et soutient encore mieux, les personnes qu’il doit soigner. J’ai été très sensible à l’expérience du médecin blessé. Il m’a montré que la vulnérabilité peut être une force et un atout, même dans des professions à grandes responsabilités. L’émission m’a encouragé à reconsidérer mon approche de la santé mentale et à m’interroger sur la manière dont nous pouvons donner aux leaders vulnérables, les moyens d’exercer leur métier.
Changer notre approche de la sensibilisation à la santé mentale sur le lieu de travail est essentiel pour améliorer les relations professionnelles et résoudre les potentiels conflits organisationnels, avant même qu’ils ne se produisent. J’ai pu constater de visu les effets positifs que peuvent avoir des employés-cadres qui affichent ouvertement leur vulnérabilité au travail. La communication s’améliore ainsi dans tous les aspects de l’entreprise. Les employés s’engagent davantage et se sentent valorisés parce que la direction écoute leurs opinions et fait appel à leur soutien. Au lieu de les affaiblir, la vulnérabilité renforce les organisations parce que les employés se sentent moins seuls et davantage liés en tant que collectif.
Après avoir réintégré mon poste de direction suite à mon congé maladie en 2019, j’ai parlé à mon équipe de mon épuisement professionnel. J’étais très nerveuse à l’idée de m’ouvrir à mes collègues, mais grâce à des conversations franches sur mon expérience, nous sommes devenus plus proches que jamais. Les membres de mon équipe m’ont dit qu’ils se sentaient inclus, lorsque je partageais mon histoire. En expliquant mon anxiété à l’idée de diriger des réunions, j’ai discuté de la manière dont chacun pourrait être impliqué dans les réunions à l’avenir. Mes collègues se sont davantage engagés, car ils ont vu que la direction les soutenait volontiers. En plus d’améliorer nos liens en tant que groupe, ma vulnérabilité assumée a amélioré notre façon de travailler ensemble.
Tout le monde ressort gagnant lorsque nous donnons la priorité à la santé mentale et que nous créons des espaces de travail sûrs pour le partage des émotions. L’une des méthodes les plus efficaces pour promouvoir des conversations ouvertes consiste à faire des bilans de santé mentale une pratique hebdomadaire régulière. Vous pouvez adapter la structure à votre équipe ou à votre entreprise, qu’il s’agisse de séances individuelles ou de discussions de groupe. Le facteur essentiel est d’ouvrir le dialogue. Plusieurs établissements d’enseignement ont mis en œuvre les bilans de santé mentale avec beaucoup de succès récemment. Les discussions sur la santé mentale réduisent l’anxiété et le stress, ouvrent la communication et mettent les gens à l’aise au sein du groupe.
Au début, il était intimidant pour moi de m’ouvrir aux autres dans un cadre professionnel. Plus je considérais la vulnérabilité comme un atout plutôt qu’un handicap, plus je comprenais qu’il s’agissait d’une aptitude que l’on peut perfectionner. En partageant notre monde intérieur, nous apprenons à écouter, à poser des questions réfléchies et à nous soutenir mutuellement. Les compétences interpersonnelles de soutien améliorent nos relations et nourrissent notre capacité à diriger une entreprise prospère. Il faut du temps pour intégrer la sensibilisation à la santé mentale dans une organisation. Avec de la patience et de la persévérance, vous constaterez un incroyable effet d’entraînement. Lorsqu’on leur donne la permission de s’exprimer pleinement au travail, les gens prennent l’initiative et partagent de nouvelles idées. L’ouverture à la vulnérabilité décomplexée peut créer une dynamique entièrement différente au sein de votre entreprise, en la rendant encore plus efficace, et ce tout en douceur. N’oubliez jamais que tout débute par une simple conversation. N’hésitez pas à contacter EVOCrh si vous souhaitez en savoir plus sur la manière de créer des lieux sûrs pour accueillir une saine vulnérabilité, dans votre entreprise.